Soupe ribollita à ma façon, aux bettes et au chou cavolo nero

Soupe ribollita  à ma façon, aux bettes et au chou cavolo nero
Hind
par

Prenons le cas épique des restes de pain.

D’aucuns en péninsule ibérique mais aussi au Maghreb, passé andalou oblige, transforment la miche familiale rassise en croûtons rissolés dans de l’huile d’olive et pléthore d’épices tout en y jetant ce qui tombe sous la main pour en faire un plat complet : le migas.

Chez nos amis de la botte, rien ne se perd tout se transforme dans les ciabattas et autres joyeusetés boulangères italiennes entre bruschettas réconfortantes et panzanellas tout en fraîcheur.

D’autres encore s’emparent des précieux reliquats  pour les noyer sous un flot d’œufs ou de lait voire les deux : cela donne les  poétiques ‘cils aux œufs » au Maroc, le pain perdu (mais pas pour tout le monde) en France ou encore le so british  bread and butter pudding .L’ajout de fruits secs ou frais rend la chose encore plus comestible : summer puddings britanniques et acidulés  aux fruits rouges, bodding belges confortables aux raisins secs rassasieront même les plus affamés dans les chaumières placides.

Quid des résidus de viande ou de légumes ou de céréales et graminées en tout genre ?

Là encore les interprétations se font tantôts audacieuses, tantôt pragmatiques afin de valoriser la moindre bribe.

Voluptueuses quiches françaises , craquantes pastillas ou briwates marocaines, mystérieuses ravioles italiennes ou asiatiques, feuilletés onctueux, lasagnes dodues, boulettes replètes , bouillons flagrants, petits farcis joufflus, hachis parmentier placides, chop sueys bigarrés , riz joyeusement sautés, onigiris avenants : des pans entiers de la gastronomie universelle sont dédiés au recyclage et à la lutte contre le gaspillage.

Car oui, cher ami lecteur, la cuisine des restes, c’est ce dont il s’agit aujourd’hui.La cuisine des restes, loin de nous affliger par ce qu’elle sous-entend comme devoirs culinaires voire de ressassements gustatifs devrait , bien au contraire, nous enchanter ! Elle est tout le contraire de la répétition puisqu’il s’agit d’inventer une texture inédite, de créer un nouveau plat à partir des vestiges de la veille.

Rien ne se perd, tout se transforme, soupçonnait déjà le génial Lavoisier. La cuisine des restes s’inscrit pleinement dans cette philosophie : c’est l’art millénaire de pratiquer l’humilité culinaire, de laisser libre court à sa créativité pour réenchanter la miche rassise ou les épluchures dédaignées.

Et la soupe du jour est un bel exemple de cette discipline ancestrale.

Fleuron de la gastronomie toscane , la ribollita est une soupe automnale et paysanne très populaire qui se pratique en général à la fin des vendanges. Restes de pain, haricots et chou vert sont les ingrédients phares de ce breuvage réconfortant, et ce dans la grande tradition des mangiafagioli (mangeurs de haricots), un surnom donné aux toscans en raison de leur appétence pour les haricots et les légumineuses en tout genre !

Il semblerait que le vocable ‘ribollita’ fasse référence au fait de re-bouillir les légumes de la veille, une pratique datant du moyen age : les paysans avaient coutume de récupérer les restes de pains et de soupes de légumes laissés par les nobles et d’y rajouter ce qui leur tombait sous la main, sans oublier bien sur les haricots longuement mijotés qui en faisaient un repas plus que complet.

Voici ma version de cette soupe revigorante et nutritionnellement plus qu’intéressante avec sa symphonie de légumes et de légumineuses : elle est végétarienne ( voire végétalienne si on omet le parmesan de la finition) mais rien ne vous empêche de rajouter un peu de pancetta au moment de rissoler les légumes pour donner une dimension supplémentaire à votre bouillon. Variez les légumes racines avec ce que vous avez sous la main et selon goût : cette soupe paysanne n’est pas chichiteuse !

Je n’utilise personnellement pas de haricots en boite ou en pots déjà cuit : je préfère acheter les légumes secs en vrac puis les tremper avant de les congeler en petits portions. J’ai ainsi toujours des légumineuses prêtes à cuire sous la main.

A vos cocottes !

Pour 4 à 6 personnes

  • 3 tiges de céleri vert (avec feuilles si possible)
  • 2 poireaux
  • 2 carottes
  • 1 panais
  • 2 petits navets
  • 1 chou rave
  • 1 moitié de  butternut (tronc supérieur ici)
  • 3 gousses d’ail hachées avec une pointe de sel
  • 1 gros oignon blanc
  • Une tige de romarin ou de thym frais
  • 2 feuilles de laurier sec
  • 250g de haricots cuits (haricots blancs ou borlotti ou encore haricots flageolets fonctionnent bien dans cette soupe)
  • 6 à 8 tiges de cavolo nero
  • 6à 8 tiges de bettes( ici de couleur)
  • 1/2 cc de paprika ou de pimenton (facultatif)
  • Sel,poivre, huile d’olive

Finition :

  • 3 à 4 tranches de pain complet  rassis coupé en dés
  • 1 petit bouquet de persil haché(feuilles et tiges comprises)
  • Au choix :Soit le jus d’un demi-citron soit un peu de parmesan fraîchement râpé (ou émincé en copeaux)(évitez à tout pris le parmesan vendu déjà râpé)
  • Huile d’olive première pression à froid

Mise en place:

Sus aux légumes : pelez le chou rave, les carottes, le navet, le panais et la butternut à l’économe. Coupez en petits dés puis réservez.Ne poussez pas le vice à couper en brunoise : rustique qu’on disait.

Émincez le céleri vert, tiges et feuilles comprises, ciselez l’oignon et coupez le poireau en tronçons, vert compris. Oui nous ne pratiquons pas l’ostracisme légumiste sur ces pages.

Émincez finement les tiges de chou et de bettes puis coupez grossièrement les feuilles.

Après tant d’efforts végétaux, soufflez et profitez-en pour chauffer 2-3 c à s d’huile d’olive dans une grande cocotte.Cuisson:

Jetez l’oignon, le laurier et le romarin puis faites rissoler 3 mn à feu moyen sans colorer. Ajoutez l’ail, le céleri vert, les carottes, le panais et le chou rave. Dorez pendant 5 mn, salez, poivrez, saupoudrez de pimienton (ou de paprika) puis mouillez d’eau à hauteur.

Couvrez et laisser cuire environ 20-25 mn à feu doux.

Pendant ce temps, mixez la moitié des haricots avec 150ml d’eau. Réservez et tournez-vous les pouces, à moins de pousser une chansonnette (italienne, cela va de soi).

Ajoutez les poireaux, les tiges de chou et de bettes émincées, la butternut et les haricots mixés: remuez puis laissez mijoter 10 mn supplémentaires et à découvert jusqu’à ce que les poireaux soient tendres.

Pour finir ajoutez le reste de haricots non mixés, les feuilles de chou et de bettes.Laissez fondre les légumes feuilles quelques minutes, à découvert.  Ici deux options s’offrent à vous : ajoutez le pain à cette étape pour épaissir la soupe à l’avance ou le rajouter en finition et selon goût.  Dans tous les cas, vous pourrez toujours détendre la soupe avec un peu d’eau si elle vous semble trop épaisse.

Choisissez votre école puis hors du feu ajoutez le persil haché.

Servez saupoudré de quelques copeaux de parmesan ou arrosé d’un peu de jus de citron et d’une lichette d’huile d’olive.

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Commentaires

  1. […] cuisson). Si vous avez un chou-rave avec tige et feuilles comme moi, gardez-les pour une soupe ( la ribollita ici par exemple!) Faites cuire le chou- rave 25 à 30 mn à la vapeur selon la taille du légume : […]

  2. Mathilde a écrit: 20 mars 2021 à 10:16

    Chère Hind,
    Encore moi… Je profite des dernières butternut, et je me régale avec cette soupe! Merci!

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