Bettes humbles aux tomates, oignons , anchois et parmesan

Bettes humbles aux tomates, oignons , anchois et parmesan
Hind
par

Un homme très pauvre et un homme très riche avaient chacun un fils. L’homme très riche monta avec son fils sur le sommet d’une colline, lui montra le paysage et lui dit : « Regarde, un jour, tout cela sera à toi ». L’homme très pauvre monta avec son fils sur la même colline, lui montra le paysage et lui dit : « Regarde ».

Je pense à ce conte oriental aux origines incertaines à chaque fois que la saison des bettes commence. Car cette belle leçon d’humilité (et de mini-pamphlet contre la vision capitaliste du monde) nous apprend à apprécier la beauté au quotidien, modestement, autour de nous. Et la bette, blette, poirée ou encore jotte est le légume humble par excellence. Le genre de bestiole que le gourmand lambda cite rarement dans sa liste de légumes préférés.

Et ce alors qu’elle nous offre des pétioles rouges, jaunes, roses ou  blancs surmontés de feuilles altières dans une magnificence ornementale qui fait  la joie des paysagistes, notamment chez nos voisins britanniques ou la « swiss chard » fait des merveilles dans les jardins foisonnant et faussement sauvages de l’Albion. Il suffit de contempler une Burgundy swiss chard_ avec une cup of tea_ pour succomber au charme de cette herbacée.

La bette, par sa modestie , est donc  un peu la cendrillon des légumes. D’abord contrairement aux américaines tomates ou aux indiennes aubergines, elle est belle et bien européenne et ancrée depuis des temps anciens dans ce qu’on appelait la cuisine des herbes, un terme un peu fourretout dans lequel on mêlait toute plante feuillue, verte et comestible.

Et pourtant malgré ce déficit d’exotisme, la bette offre bien des réjouissances gourmandes : ses cardes ont un gout délicat avec une légère amertume bienvenue, tandis que ses feuilles n’ont rien à envier à son cousin épinard de la même famille des Chénopodiacées.

En Belgique, elle fait évidemment partie intégrante du patrimoine culinaire grâce à la fameuse » tarte al d’jotte « Nivelloise. Mais aujourd’hui nous la cuisinerons sous des auspices niçois, avec un heureux mariage entre tomates, bettes, oignons, céleri vert, anchois et ail. Une recette simple, inspirée par Alain Ducasse lors d’une interview où il racontait son parcours tout en mentionnant les petits bonheurs des plats simples, en faisant une belle place aux légumes de saison.

Nous profiterons ainsi de la saison finissante des tomates et du début de celle des bettes pour un petit plat réconfortant et parfumé qui tentera de préserver la saveur de chaque légume, sans les noyer de crème ou de sauce, un peu façon tian. Les bettes seront utilisées entières, côtes et feuilles réunies avec une pré-cuisson des cardes dans une sauce à l’anchois et à l’ail. Le parmesan n’est pas strictement indispensable mais apportera une note un peu plus riche dans ce plat léger.Le céleri vert servira de condiment poivré naturel tandis que la chapelure va absorber les jus en ajoutant de la texture.

Ce tian peut se servir en accompagnement d’une viande ou d’un féculent mais se suffit également à lui-même avec une belle tranche de baguette croustillante par exemple.C’est impérial avec des pâtes simplement assaisonnées à l’ail et à l’huile d’olive.

A vos couteaux, sans chichis, tout en apprenant à regarder, peut-être au-dessus d’une colline.

Pour 2 personnes:

  • 300g de bettes (ici blanches et vertes)
  • 2 belles tomates bien mures (ici des cornues des andes bien charnues)
  • 1 petit oignon rouge
  • 1 tige de céleri vert avec feuilles
  • 6 anchois à l’huile
  • 2 gousses d’ail
  • 10g de beurre
  • 30g de parmesan fraichement râpé
  • 30g de chapelure
  • poivre, huile d’olive

 

Commençons par préchauffer le four à 180°C.

bettesPréparons tous les légumes : séparez les cardes des feuilles de bettes, coupez les tomates en deux puis en tranches fines, émincez l’oignon en demi-lunes tout aussi fines. Hachez le céleri vert, tiges et feuilles comprises de même que l’ail. Hachez les anchois grossièrement au couteau.

Commençons par la cuisson des cardes : faites fondre le beurre avec une c à s d’huile d’olive dans une grande poêle à couvercle. Ajoutez la moitié de l’ail et les anchois puis rissolez le tout pendant 5 minutes. Jetez les côtes de bette dans la poêle, remuez comme un beau diable puis baissez le feu et laissez cuire à couvert pendant une dizaine de minutes. Ajoutez 150ml d’eau puis laissez réduire à découvert et à feu doux pendant une quinzaine de minutes jusqu’à ce que les cotes de bettes soient bien tendres et le jus aux anchois bien onctueux. Ne salez pas, malheureux, rapport aux anchois mais poivrez légèrement.  Égouttez les côtes et réservez le jus.

Tombons la chemise, heu enfin la feuille. Chauffez 2 c à s d’huile d’olive dans une grande poêle, ajoutez le reste d’ail puis faites sauter les feuilles de bette à feu moyen, le temps qu’elles s’étiolent, pas plus (5 minutes grand maximum selon la taille des feuille). Réservez.

Huilez légèrement un plat à gratin avant de le saupoudrer de chapelure et de céleri vert haché. Disposez une rangée de cardes, une rangée de feuilles de bettes, une rangée de tomates et une rangée d’oignons émincés. Ou l’inverse ou comme bon vous semble : rangez et puis c’est tout , jusqu’à épuisement des ingrédients (et du cuisinier).

bettes

Arrosez du reste de jus aux anchois et saupoudrez de parmesan fraichement râpé : vous aurez remarqué que je ne sale pas dans cette recette vu la présence d’anchois et de parmesan.

Enfournez pour 15 minutes. Servez immédiatement et goutez immédiatement en dévastant tout votre soigneux rangement précédent.

 

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Commentaires

  1. […] effet comme nous l’avons vu dans la première recette de bette de cette saison, nous avons affaire à un légume très ancien sur le continent dont on trouve de nombreuses traces […]

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