Tajine de poulet aux coings et au miel

Tajine de poulet aux coings et au miel
Hind
par

De quelqu’un qui n’apprécie pas les bienfaits dont la bonne fortune l’a doté, l’on dira « Dieu donne des fèves à ceux qui n’ont pas de dents ». Et pan dans les gencives !

Pour signaler qu’une initiative quelconque n’en est qu’à ses débuts et qu’il est encore temps de renoncer ou que les échecs ne sont pas encore flagrants, on soupirera d’un air docte : » Nous n’avons encore rien brûlé dans le tajine ».

Quiconque rechigne devant l’effort se verra vertement fustiger avec le catégorique : » celui veut qui veut le miel, doit supporter la piqûre des abeilles ». Dans le même esprit, l’on inculquera à l’impudent la valeur de la patience en lui assénant : « Les aubergines se mangent avec lenteur ».

Les gloutons se feront morigéner avec l’inénarrable : « Son ventre le conduira jusqu’à la mer », mais on leur pardonnera volontiers car « Qui dort affamé que dieu ait pitié de lui. »

Et l’on n’oubliera pas d’annoncer aux envieux que « celui qui n’atteint pas la grappe de raisin, proclame qu’elle est acide », tout en rappelant, avant qu’il ne soit trop tard, à ceux qui parlent trop  sans prendre le temps de réfléchir « la langue n’a pas d’os ».

Toutes ces maximes pleines de bon sens, ayant plus ou moins de lien avec la nourriture sont en fait des proverbes marocains, exprimés en darija, le dialecte arabophone marocain( à ne pas confondre avec les langues berbères dont hélas je ne connais pas les dictons, ce sera un prochain chantier !). Ils font partie d’un patrimoine oral séculaire qui montre que ce pays a été longtemps une terre d’échanges et de mélanges culturels, où l’agriculture et la gastronomie ont toujours occupé une place importante non sans une philosophie de la vie penchant plutôt vers l’épicurisme et la bonne chère.

Rendons donc hommage aujourd’hui à la cuisine marocaine avec un grand classique des tajines sucrés salés : la tajine aux coings. Ce plat réconfortant se prépare aussi bien avec de la viande rouge ( épaule d’agneau ou jarrets de bœuf ou de veau) qu’avec de la volaille pour un résultat parfumé, tout en délicatesse, qui fait honneur à notre coing automnal.

Ce plat s’inscrit ainsi dans la grande traditions des plats marocains mijotés aux fruits : pommes( du printemps), poires, pruneaux, abricots, dattes font partie des grands classiques des tajines sucrés-salés, une branche non négligeable de la famille des tajines.

Si vous n’avez pas de smen, le beurre fermenté marocain( cf photo dans le bocal ci-dessous), à ne pas confondre avec le beurre clarifié (à l’instar du ghee indien), je vous rappelle cette petite astuce déjà utilisée sur ces pages : une cuillère à café rase de roquefort mélangée à la même quantité de beurre de ferme fera illusion !(si si, mais allez-y mollo sur le roquefort quand même).

Il y a deux versions pour ce tajine : une version aux coings caramélisés que je vous propose ici à ma façon, et une version où l’on se contente de cuire les coings avec la viande sans autres salamalecs (c’est le cas de le dire). Les deux sont tout à fait comestibles.

Vous aurez besoin d’un cocotte en fonte et d’une petite marmite pour réaliser la deuxième étape de la recette : les coings caramélisés

A vos cocottes et appliquez-vous ! Préparé avec le cœur, un tajine est toujours bon car de toute façon « que va dire le marchand de fèves ? qu’elles sont tendres ! »(un autre adage marocain souvent très utile en cuisine).

Pour 4 personnes:

  • 1 beau poulet fermier biologique coupé en morceaux(gardez la peau s’il vous plaît, elle protège la chair pendant la cuisson)
  • 1 cc de smen (voir astuce dans le texte plus haut)
  • 2 c à s d’huile d’olive
  • 4 coings
  • Le jus d’un citron
  • 2 bâtons de cannelle
  • 2 étoiles de badiane (anis étoilé)
  • 1 pincée de pistils de safran
  • 1 petit morceau de gingembre frais (1,5 cm environ), pelé et râpé
  • 1 petit morceau de curcuma frais(1 cm environ), pelé et râpé, sinon 1 cc de curcuma en poudre
  • 3 oignons blancs (environ 400g)
  • 2 c à s de sucre de canne blond
  • 4 c à s de miel
  • 1 cc de fécule de maïs ou d’arrow root
  • Sel, poivre du moulin
Finition :
  • 2 c à s de sésame grillé
  • 3 c à s d’amandes mondées et légèrement torréfiés à sec dans une poêle

Préparons les ingrédients : coupez les coings en quartiers (sans les peler, nous sommes en bio ici et la peau est éminemment comestible), enlevez les membranes internes et les noyaux. Arrosez le coins de jus de citron pour éviter l’oxydation. Salez le poulet sur toutes ses faces et râpez les oignons à la grosse râpe après les avoir pelés.

Une fois les larmes des oignons essuyées, chauffez 2 c à s d’huile d’olive dans une grande cocotte. Faites dorer les morceaux de poulet 5 mn de chaque côté à feu moyen.

Sortez le poulet de la cocotte puis remplacez-le par les oignons ,la cannelle, l’anis, le gingembre et le curcuma râpés. Touillez un bon coup et dorez le tout pendant 5 minutes. Salez, poivrez, ajoutez le safran , le smen ,le poulet puis couvrez d’eau à hauteur.

Portez à ébullition puis baissez le feu(2 à 3 maximum sur induction). Ajoutez les coings dans la cocotte couvrez, puis laissez cuire 45 mn à 1h , toujours à feu doux jusqu’à ce que les coings et le poulet soient cuits.

Sortez le poulet de la cocotte et gardez-le au chaud : vous pouvez aussi le faire légèrement griller au four pour une peau croustillante avant de servir (facultatif).

Prélevez 4 louches de jus de tajine et versez les dans une autre marmite : ajoutez le miel et le sucre puis laissez caraméliser à découvert pendant un quart d’heure à feu vif en surveillant. Ajoutez les coings, baissez le feu et laissez-les s’imprégner de la sauce caramélisée pendant 10-15 mn en retournant les fruits de temps à autre.

Pendant ce temps délayez l’arrow root ou le fécule de maïs avec un peu d’eau, et ajoutez ce mélange dans le reste de la sauce du tajine, qui se morfondait dans la cocotte. Laissez réduire à feu doux le temps que les coings caramélisent.

Avant de servir , remettez le poulet dans la cocotte pour le réchauffer dans la sauce.

Servez la viande dans un grand plat, versez la sauce par-dessus, disposez les coings tout autour en arrosant avec un peu de leur sauce caramélisée : les deux sauces vont se mélanger légèrement pour le grand bonheur des gourmets.

Saupoudrez de sésame et d’amandes et servez avec du pain croustillant pour bien saucer.

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Commentaires

  1. Guillaume a écrit: 23 septembre 2020 à 9:58

    Bonjour Hind,
    En berbère, pour indiquer à quelqu’un qu’il faut être patient : imic simic assaï kechoum ar3am Agdour. Petit à petit le chameau entre dans la marmite.
    Un autre encore donc je ne comprends pas trop la signification. Peut-être est ce pour inciter à la discrétion. Bder aman adsouin tazzanine. Si tu agites l’eau, les enfants accourent.
    Il a l’air super bon ton Tagine. Je tente ça aujourd’hui

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