Tofu laqué au gochujang, goguma-bap et pickles de carottes mauves

Tofu laqué au gochujang, goguma-bap et pickles de carottes mauves
Hind
par

 

Dès les premiers frimas d’automne, de drôles de petites échoppes mobiles et fumantes s’installent dans les rues de la péninsule coréenne , se frayant une place dans la myriade d’autres vendeurs de spécialités culinaires du pays du matin calme.

Les coréens de tous âges s’y bousculent pour déguster un tubercule brulant enveloppé de papier journal ,tout droit sorti d’une  singulière rôtissoire en forme de baril. La peau noirâtre découvre ça e là des protubérances orangées , l’on déguste à la main et à grands bruits  la chose incandescente, et le sourire soudain des gourmets de tout poil nous laisse entrevoir qu’il s’agit là d’une affaire de la plus haute importance.

Nous sommes en effet en présence d’une des nourritures de rue les plus populaires de Corée, qui a réussi à transcender les frontières et les clivages politiques entre le nord et le sud de la péninsule, tant sa gloire ne supporte point le débat : la patate douce rôtie ! Et au charbon de bois s’il vous plait. Ce mode de cuisson concentre le gout et les sucres naturels de la patate, et constitue l’un des encas les plus célèbres de Corée, propulsé même au rang de gouter national pour les écoliers. Cette douceur tient dans le cœur des coréens la même place que notre gaufre nationale : une gourmandise de réconfort, hautement préconisée par temps de froid et de bruine réunis. La consolation des aliments humbles semble donc universelle.rotissoirecoree2

Car entre la Corée et le « Goguma » (patate douce en hangeul), il s’agit d’une véritable histoire d’amour. Ce légume gorgé de vitamines, de fibres  et d’antioxydants tout en ayant le mérite d’être rassasiant , doté qui plus est d’un index glycémique très bas, est considéré en Corée comme l’aliment santé par excellence. Le tout porté par une gastronomie qui se caractérise déjà  par sa cuisine relativement saine et très peu encline à utiliser du sucre et  des matières grasses.

Le « goguma » en Corée se déguste partout et sous toute les formes. Vapeur ou rôti , avec du kimchi, en bâtonnets frits, en dessert caramélisé, en boisson avec du lait : l’imagination coréenne semble sans limite !Et non seulement les coréens sont friands du tubercule mais ils se délectent  également avec  les tiges et les feuilles, sautées au wok par exemple et servies comme un des multiples petits accompagnements du repas coréen.

Mais comment diantre ce jovial tubercule, tant gorgé de bienfaits aurait-il atterri  en Corée. Voilà le genre de questions qui me taraudent au quotidien ami lecteur, entre deux symphonies d’Excel et de PowerPoint.

Originaire d’Amérique du sud (pata chez les amérindiens, qui deviendra batata chez les espagnols puis patate en français), Christophe Colomb aurait rapporté des plants de patate douce en Espagne des 1495. Toujours sous étendard espagnol, elle essaime d’abord en inde où elle est nommé igname espagnol (Ima Castilla). Les espagnols la transportent ensuite au Japon, en Chine, aux philippines et sans doute également en Corée. L’histoire des empires et des cuisines se confondent qu’on disait.

Pour ma part, à force de contempler des films et des kdramas (feuilletons coréens) où les héros s’empiffraient de patate douce, j’avais très envie de me faire un petit repas coréen. J’ai résolu de faire un célèbre plat des familles, le gogumabap ou riz à la patate douce(goguma= patate douce, bap= riz, CQFD)  et sa petite sauce bien relevée au piment et au gingembre, j’ai improvisé ensuite deux petits accompagnements : du tofu laqué au gojuchang (la fameuse pâte de piment fermenté coréeenne), et des pickles à la japonaise de carottes violettes (devenus fushia  au contact du vinaigre) pour un contraste bienvenu. Bien entendu vous pouvez accompagner ce repas;vegan sans trop le faire exprès ,de kimchi pardi!

Pour 2 personnes

Gogumabap (riz à a patate douce)

  • 210g de riz rond japonais (riz à sushi)
  • 1 patate douce(environ 250g à 300G) pelée et coupée en petits dés(1 cm environ)
  • 260g(=260ml) d’eau

Sauce :

  • 60ml de shoyu ou de tamari(en vente dans tous les magasins bio)
  • 1 cà s  de miel
  • 2 c à s de vinaigre de riz ou de cidre
  • 4 c à s de ciboule ou de vert de poireau , finement émincé
  • 2 gousses d’ail  hachées
  • 1 c à c de gingembre râpé
  • 1 cc de piment coréen (gochu garu, en vente en épicerie asiatique) mais avec  des flocons de piments classiques ce sera bon quand même!
  • 1 c à s de graines de sésame complet rôties (en magasin bio)

Tofu laqué au gochujang :

  • 250g de tofu ferme biologique
  • Huile de tournesol pour la cuisson du tofu
  • laque:
  • 3 c à s de gochujang (pâte de piment fermenté, en vente en magasin asiatique )
  • 2 c às  de mirin
  • 2 c à s de shoyu ou de tamari
  • 2 c à s de sucre muscovado
  • 1 cà s d’huile de sésame
  • 2 gousses d’ail râpées
  • 1 cc de gingembre frais râpé
  • Poivre du moulin

Pickles de carottes violettes

  • 500 à 600g de carottes violettes
  • 80 de gingembre frais
  • 200ml de mirin
  • 200ml de vinaigre de riz ou de cidre
  • 3 c à s de sucre
  • 2 cc de sel

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Où l’on se pique de pickles : épluchez les carottes puis les émincer en rondelles ou tagliatelles à l’aide d’une mandoline. Pelez les gingembre et détaillez le en fines lamelles. Faites chauffer le mirin dans un poêlon : portez à ébullition puis baissez le feu et laisser mijoter pendant 3 mn. Hors du feu ajoutez le gingembre, vinaigre , le sucre et le sel. Laissez refroidir puis versez sur les carottes . Entreposez au réfrigérateur et laissez reposer au moins une heure avant de consommer (ces pickles peuvent par ailleurs se conserver jusqu’à 2 semaines). Et oui ne vous étonnez pas: les carottes se parent de pourpre au contact de la saumure.

Où l’on attaque sans pathos la piquante sauce : fouettez comme un malpropre tous les ingrédients de la sauce dans un grand bol, gardez au frais jusqu’au moment de servir

Où l’on pousse le riz vers la patate douce : lavez le riz à grande eau (froide) en égrainant la masse 5 à 6 fois au moins jusqu’à ce ce que l’eau ne soit plus trouble. Egouttez dans une passoire et laissez reposer une dizaine de minute. Il est temps de passer à la cuisson du riz où deux écoles s’affrontent :

L’école du cuiseur à riz( rice cooker) : versez le riz dans le rice cooker , ajoutez 260g d’eau froide(non salée), les dés de patates douces , couvrez et laissez l’appareil travailler.

L’école du micro d’argent heu de l’huile de coude : versez le riz dans une petite cocotte, suivis des 260g d’eau et terminez par les patates douces. Portez à ébullition puis baissez le feu, couvrez et laissez cuire à feu très doux pendant 10 mn. Hors du feu laissez reposer 15 mn avant de consommerToFuLaque14

Où l’on plaque le tofu dans la laque : séchez le tofu avec du papier absorbant 2 à 3 reprises.Le tofu biologique a ceci dit l’avantage d’être moins aqueux. Découpez la masse en rectangles uniformes. Chauffez un petit fond d’huile de tournesol dans une grande poêle à feu moyen et dorez le tofu 3-4 mn de chaque côté. Pendant ce temps mélangez soigneusement tous les ingrédients de la laque et mixez jusqu’à avoir une sauce homogène. Égouttez le tofu puis brossez la surface à l’aide d’un pinceau avec la laque au gochujang. Disposez sur une taque garnie de papier sulfurisé. Passez sous le grill du four 5 mn à 200°c en surveillant (la population des fours est variable et capricieuse).Saupoudrez éventuellement de sésame grillé et de ciboule.

Comment ça se mange : on verse un peu de sauce sur le riz aux patates , on engloutit riz pataté et saucé avec des bouchées de  tofu avant de se rincer le palais aux pickles. Le mélange d’acidité , de piquant et de douceur grâce aux patates douces en ravira plus d’un.

On peut faire le tout au son d’une très jolie chanson folk coréenne : https://www.youtube.com/watch?v=AdKAT0zvCJE

 

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Commentaires

  1. […] Cette sud-américaine ,aux origines semble-t-il péruviennes ,danse l’andine  marinera des couleurs : du rouge vibrant au beige modeste en passant par une panoplie de jaunes, oranges et autres violacés affriolants ;et la robe et la chair se prélassent dans des ramages palpitants. Mais hélas  dans la grande cour des séductions potagères,   ces parures n’ont pas toujours suffi à l’élever au rang des séductrices irrésistibles. C’est que le bulbe, la rave, le tubercule, toute racine proche de la terre donc qualifiée illico  presto de rustique voire humble ont longtemps eu mauvaise presse dans les tablées occidentales. Ce qui n’est pas le cas de l’Orient ou de l’Asie comme en témoigne les splendeurs gustatives indiennes ou la tradition de gokuma rôtie coréenne, déjà évoquée ici. […]

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