Blanquette de veau aux légumes racines et à l’orange

Blanquette de veau aux légumes racines et à l’orange
Hind
par

Madame Bovary n’avait de cesse de vaincre l’ennui, ce satané ennui qui jetait un voile morne sur sa vie de bourgeoise provinciale. Elle rêvait d’amours romantiques et de toilettes princières jusqu’à l’issue fatale, sous la plume d’un Flaubert magnant la plume comme un scalpel pour disséquer son personnage féminin étouffé par les conventions et par les ciels bas d’une Normandie indifférente.

Anna Karénine, jeune mère de famille modèle qui mène une existence des plus tranquilles s’éprend tout d’un coup violemment du frivole mais irrésistible comte Alexis Vronski et abandonne tout pour le suivre. Tolstoï décrit avec une brillante cruauté la tragédie éternelle de l’amour coupable, lançant au détour d’une phrase portée par les épiques bourrasques russes, cette question impossible au lecteur : qu’aurait-on fait à la place d’Anna ?

Dans un conté du nord anglais balayé par les vents humides de l’Albion géorgienne, Jane Eyre, jeune préceptrice au passé douloureux et au physique prétendument ingrat, tombe éperdument amoureuse de son mystérieux employeur Edward Fairfax Rochester. Charlotte Brontë en profite pour révolutionner l’art de la prose en écrivant son roman à la première personne, tout en décortiquant avec une précision d’orfèvre la psychologie de son héroïne.

Vous l’aurez compris ami lecteur et potentiellement cuisinier : assommée que j’étais par les virus fourbes saisonniers.j’étais en pleine relecture de grands  classiques du XIX ème siècle ayant pour personnages principaux des femmes.

Entre deux accès de fièvres j’en étais arrivée aux conclusions suivantes : ces protagonistes féminines gambadaient irrévocablement  dans des paysages glacés et se piquaient toutes de passions grandiloquentes. Toutes connaissaient un destin tragique, sauf Jane Eyre (par hasard écrit par une femme, ahum).

Tout cela  n’arrangeait pas mes affaires de microbes.

J’avais pour ma part repéré un bien meilleur remède contre la froidure : au lieu de partir en quête d’un amant romantique , je résolus de me faire accompagner d’une blanquette.

Parfaitement ! Je rêvais mordicus d’une blanquette onctueuse qui m’apporterait ce réconfort tant convoité lors des premiers frimas. Et pour la rafraîchir tout en coupant cette mollesse ivoire par de l’acidité bienvenue, je décidai de la parfumer avec de l’orange , un fruit qui se marie à merveille avec les légumes racines de ma blanquette. Je n’ai pas mis de jaune d’œuf dans la liaison de ma sauce que je ne voulais pas trop riche , mais libre à vous d’en rajouter.

Il ne restait plus qu’à relire Zola et cette fameuse scène de repas de l’Assommoir :

«Ah ! tonnerre ! quel trou dans la blanquette ! Si l’on ne parlait guère, on mastiquait ferme. Le saladier se creusait, une cuiller plantée dans la sauce épaisse, une bonne sauce jaune qui tremblait comme une gelée. Là-dedans, on pêchait les morceaux de veau ; et il y en avait toujours, le saladier voyageait de main en main, les visages se penchaient et cherchaient des champignons. Les grands pains, posés contre le mur, derrière les convives, avaient l’air de fondre. Entre les bouchées, on entendait les culs des verres retomber sur la table. La sauce était un peu trop salée, il fallut quatre litres pour noyer cette bougresse de blanquette, qui s’avalait comme une crème et qui vous mettait un incendie dans le ventre.»

Pour 4 personnes :

  • 700g de viande de veau pour blanquette coupés en gros dés (épaule et collier en géneral)
  • 2 panais
  • 2 carottes
  • 4 à 6 petits navets boule d’or
  • 1 persil tubéreux
  • 1 poireau
  • 150 g de champignons de Paris bruns
  • 3 échalotes
  • 2 gousses d’ail
  • 1 bouquet garni
  • 2 clous de girofle
  • 5 graines de poivre noir
  • 1 baie de genièvre
  • 1 orange
  • 70 g de lardons fumés
  • 600ml de bouillon de légumes
  • 100ml de vin blanc sec
  • 1 c à s d’huile d’olive pour la cuisson
  • 1 c à s de beurre clarifié (ou à défaut de beurre tout court)
  • Sel au goût

Finition :

  • 20g de beurre
  • 20g de farine de blé
  • 200ml de crème fraiche liquide entière
  • Une pincée de muscade fraichement râpée
  • Une douzaine de tiges de persil plat haché (feuilles et tiges comprises)

 

Sus aux légumes :pelez les panais,le persil tubéreux, les carottes et les navets. Détaillez les carottes, le panais et le persil en tronçons de taille moyenne. Otez les cheveux du poireau, coupez le blanc en morceaux moyens(1,5 cm environ), émincez le vert très finement (il servira en finition pour apporter une note herbacée).

Pelez et pilez l’ail avec une pincé de sel, coupez les échalotes en brunoise, tranchez les champignons en deux.

Zestez l’orange avant de la presser. Réservez

Dans une grande cocotte, chauffez le beurre clarifié et l’huile d’olive : salez légèrement les morceaux de veau et saisissez-les une minute à feu moyennement vif, 1 mn de chaque côté. Ôtez la viande de la cocotte et remplacez-la par les champignons. Salez légèrement les champignons et laissez-les rissoler 3 minutes sans touiller de chaque côté. Réservez les champignons (nous les remettrons dans la cocotte en fin de cuisson)

Versez les lardons, l’ail et les échalotes dans la cocotte : touillez pendant 5 mn, ajoutez le veau puis déglacez avec le vin blanc. Ajoutez ensuite le bouillon , les graines de poivre, les clous de girofle,le genièvre , le bouquet garni, salez légèrement puis portez à ébullition : dès que l’ébullition est atteinte, baissez le feu sur température moyenne puis laissez cuire une dizaine de minutes en écumant éventuellement les petits impuretés (j’avoue que je le fais peu sérieusement pour ma part).

C’est le moment d’ajouter les légumes racines : disposez les carottes, le persil tubéreux, les panais et les navets dans la cocotte, couvrez et laisser mijoter à feu doux pendant 1h.

Ajoutez les blancs de poireaux et les champignons puis laissez cuire 15 mn supplémentaires.

C’est le moment de passer à la sauce : versez le bouillon de la blanquette dans un récipient à bec verseur. Arrosez la blanquette avec le jus de l’orange pressée et gardez au chaud à température minimale (1 sur induction) ,le temps de faire la sauce.

Dans une petite casserole ,réalisez un roux avec la farine et le beurre : faites fondre le beurre à feu moyen (4 sur induction) puis ajoutez la farine en pluie avant de touiller sans cesse à l’aide d’un fouet. Laissez bien la farine cuire((environ 7 à 8 mn)) avant de rajouter le bouillon. Versez le bouillon petit à petit sans cesser de touiller jusqu’à ce que la sauce épaississe (comptez 10 à 15  minutes) sans qu’elle ne se transforme en bouillie. Ajoutez ensuite la crème fraîche liquide et mélangez bien.

Versez la sauce dans la cocotte : ajoutez les zestes d’agrumes et réchauffez le tout quelques minutes à feu doux avant de servir saupoudré de persil haché.

Accompagnez le tout avec des pommes de terre au four, du riz ou encore de l’épeautre .

 

 

 

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