Pain noir sans pétrissage au cacao et à la bière
par Hind
Chaque année, quand Noël approche, je m’adonne à un petit plaisir qui me ravit : à cette époque je suis en général dans un état comateux après avoir passé ma vie à la gagner dans les tours de verre pendant douze mois ; tout enchantement du quotidien est donc le bienvenu.
Et c’est là que les émissions ‘christmas special » de la vénérable BBC entrent en scène : tous les programmes se mettent à l’heure de Noel en se parant de couleurs vives et de musique festive sans jamais céder à la mièvrerie ni à la guimauve mais en gardant plutôt un esprit bon enfant. C’est un exploit dont seul la BBC est capable à mon humble avis, tant par chez nous la pléthore de téléfilms de noël dont l’ambition est de débrancher le maximum de neurones humains est devenue une tradition quasi christique.
Et cette année plus que toute autre, ce besoin était encore plus impérieux vu la folie pandémique que nous traversons où le féerique a cédé la place à l’hygiénique pendant que des millions de quidams se découvraient des talents de virologues insoupçonnés dans une atmosphère de fin du monde kafkaïenne. Nos amis britanniques ont vu d’ailleurs leurs malheurs décuplés par le contexte du brexit, conduisant à la création d’un néologisme très british : brexmas !
Ni une , ni deux, la bbc a bien compris que les téléspectateurs avaient besoin de réconfort entre deux nouvelles souches de coronavirus et s’est donnée la noble mission d’offrir des émissions de cuisine festives spécial Noel malgré le chaos ambiant. Car oui ,on peut sombrer avec le Titanic mais avec un verre de brandy à la main et des ginger snaps plein les babines , la fin du monde est tout de suite’ utterly stylish’.
C’est tout de même un comble que ce soit une île accusée des méfaits culinaires les plus divers qui propose les émissions de cuisine les plus passionnantes. Il faut dire que nos amis de l’Albion ont l’art de filmer l’acte culinaire avec une précision mêlée de sensualité rarement égalées : la clarification des œufs frise alors l’érotisme, les pâtes à brioches se prélassent glorieusement dans leurs écrins de saladiers pastel, le sucre brun se répand sur les british puddings dans un bouleversant élan de communion tandis que la peau brillante et croustillante des ‘chrismas roast’ sortant du four provoquent une joie très immédiate.
Et il est impossible de parler de sensualité en cuisine d’outre manche sans évoquer le cas de Nigella Lawson , la ‘ domestic godess ‘ herself qui effectuait son grand retour sur les antennes de la bbc cette année.
Il faut dire que Nigella a construit toute sa carrière avec la particularité de parler de becquetance avec une sensualité qui crève l’écran où la moindre tambouille prend des allures de proposition érotique tant la cheffe glisse des qualificatifs voluptueux dès qu’elle se saisit de la moindre louche de bois. La belle Nigella ne prétend nullement à la qualité de cheffe mais se définit plutôt modestement comme cuisinière ou home cook.
Dans sa maison parfaite , avec sa a cuisine rutilante ,ses ustensiles impeccables et la bande son joyeuse qui accompagne toutes ses émissions , Nigella propose des recettes faciles mais qui en jettent , adaptées à la vie domestique tout en se mettant au service d’une mission de la plus haute importance : la gourmandise ! Nigella ne prétend ni faire de la diététique ni vous aider à passer votre CAP cuisine : le plaisir de cuisiner et de partager reste son moteur principal.
Et malgré ses affectations, son ton parfois trop précieux, son Londres fantasmé où elle ne se déplace qu’en taxi, ses allusions lascives parfois trop appuyées jusqu’à en devenir caricaturales, et sa cuisine à la décoration immaculée ,il est impossible de détester Nigella. The « domestic goddess » possède en effet un humour british désarçonnant qui fait qu’elle ne se prend jamais trop au sérieux dans ses entreprises culinaires : elle reconnait ses propres faiblesses (ses talents au couteau restent toujours à désirer après plus de 20 ans d’émissions culinaires), se moque de ses propres obsessions (par exempe une collection de gadgets culinaires hautement inutiles) et en toute circonstance garde un plaisir de cuisiner hautement contagieux. Et puis quiconque connaît la vie personnelle de la séduisante goddess sait qu’elle a eu son lot de malheurs ce qui conduit à une empathie bienvenue du téléspectateur
J’étais donc avachie devant mon écran à admirer les prouesses de la séduisante Nigella quand soudain une recette attira mon attention : le pain noir sans pétrissage idéal pour les toasts des fêtes ! De la flemme, du cacao, des épices et une promesse de gout sans quasi aucun effort à fournir : Nigella avait pensé à moi en cette fin d’année défraichie où la simple vue d’une poche à douille me plongeait dans un abime d’épuisement !
Ni une , ni deux, et après quelques adaptations pour belgiciser la recette et surtout utiliser les ingrédients de mon placard, je me lançai dans l’entreprise du pain noir un jour avant noël avec toute la paresse dont j’étais capable. Et ma foi le résultat fut « glorious » comme dirait cette chère Nigella.
Ce pain accompagne merveilleusement les poissons fumés ou les charcuteries mais aussi les tartinades de légumes ; simplement tartiné de beurre de barate il confine à l’éblouissement. Il suffit de s’y prendre à l’avance pour réaliser la pâte la veille
A vos saladiers !
Pour un moule à pain de 30*10*12 cm(900 g de pâte environ)
Ingrédients secs :
- 200g de farine d’épeautre complet biologique
- 100 g de farine de seigle biologique
- 300g de farine de froment blanc T65 biologique
- 25 g de cacao non sucré
- 30g de sucre muscovado
- ½ cc de levure sèche de boulanger
- 10g de sel fin
- 4 c à s de graines de fenouil
- 2 c à s de graines de carvi
- 2 c à s de graines de nigelle
- 2 c à s de graines de lin
Ingrédients liquides :
- 450ml de bière brune(j’ai utilisé de la chimay personnellement)
- 2 c à s de mélasse de sucre brun (en vente en magasin bio)ou de sirop de liège
- 2 c à s d’huile de tournesol(+ un peu plus pour huiler le saladier)
- 1 blanc d’œuf
Finition :
- 2 c à s de graines de lin
- 2 c à s de graines de sésame
Commencez la préparation du pain la veille : huilez un grand saladier capable de contenir la poussée de la pâte qui va quasiment doubler de volume(poussée lente pendant la nuit)
Mélangez tous les ingrédients liquides séparément. Mélangez tous les ingrédients solides séparément. (oui cette recette est d’une simplicité enfantine)
Ajoutez les ingrédients liquides aux ingrédients solides : touillez soigneusement le temps que les ingrédients secs aborbent les liquides, mais sans pétrir. La pâte est collante : c’est normal, nulle inquiétude à avoir.
Versez le tout dans le grand saladier huilé , couvrez avec un linge propre et laissez lever de 16 à 20h le temps que la pâte double de volume
Le lendemain, graissez le moule à pain avec un peu d’huile de tournesol avant de le chemiser de papier sulfurisé (le graissage préalable permet de faire tenir le papier). Graissez légèrement le papier au pinceau
Versez la pâte dans le moule et laissez lever pendant 2 bonnes heures. Pendant ce temps, préchauffez le four à 220°C
Au moment de cuire le pain, humidifiez la surface légèrement à l’aide d’un pinceau mouillé avant de saupoudrer de graines de lin et de sésame.
Baissez la température du fou à 200 et faites cuire le pain pendant environ 40 mn, au milieu du four. Démoulez le pain avant de le remettre au four (sur la grille ) pendant environ 15 mn.(au milieu du four ou en bas, pour éviter de brûler la surface).
Déposez le pain sur une grille puis laissez-le refroidir complétement avant de le découper.
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C’est vraiment incroyable. Très bon texte.