Mousse de yaourt à l’agar-agar et aux myrtilles

Mousse de yaourt à l’agar-agar et aux myrtilles
Hind
par

« I found my thrill
On Blueberry Hill
On Blueberry Hill
When I found you »

Il y avait Fats à la radio, oui Domino, the great, celui qui commit également le légendaire ‘Blue Monday’. Ah cette profondeur suave dans la voix et ce blues lancinant qui m’accompagnait depuis l’enfance, alors que je n’avais  jamais tâté une myrtille de près ou de loin dans mon Rabat natal.

Alanguie sous la chaleur écrasante, je ne dévalais aucune colline et nul chevalier servant ne me faisait tressaillir . Je faisais plus prosaïquement la sieste sous un arbre, quelque part plus loin au sud, des cigales et du blues au creux des oreilles. Loin des dieux capricieux du Powerpoint et de l’Excel, loin des tours de verre aux badges asservissants, je m’abandonnai à cette activité qu’aucune tribu dite primitive ne pratique : les vacances.

J’écoutais mes os, comme un ancien adage marocain ne cesse de le vanter. Et croyez-moi, c’était un exercice qui requérait toute mon attention, mobilisait tous mes sens afin d’atteindre le but ultime : ne rien faire.

J’étais donc très occupée à ne strictement rien produire quand soudain, quelques symptômes bien connus firent leur apparition : fourmillement inopiné dans les doigts, cerveau brusquement en ébullition, gargouillement d’estomacs impromptus et la vision d’une planche à découper façon monolithe mystérieux  de l’inénarrable ‘2001, l’odyssée de l’espace’ !

Ami lecteur, vous aurez sans doute reconnu ce mal proverbial : j’ai nommé la transe culinaire qui s’empare des cuisiniers même au fin fond des tropiques, cette soif inextinguible de transformer un ingrédient, peu importe lequel, cette agitation fiévreuse qui vous fait bondir sur la première mandoline venue !

L’inspiration n’était pas à chercher bien loin : des myrtilles pardi ! Sur l’air de blueberry hill, what else ?Surtout que cette jolie baie bleuâtre, débordante d’antioxydants, a la réputation d’améliorer la vue et surtout la vision de nuit. En témoignerait l’utilisation par la Royal air force durant la seconde guerre mondiale de « bilberries », un cousin de notre myrtille des chaumières.

Mais je n’avais ni des ambitions de pilote ni des aspirations de chauve-souris : j’avais des envies plus triviales de dessert estival, facile et rafraîchissant à la fois.

Il fallait du léger, du parfumé sous la moiteur compacte : je me lançai donc dans cette mousse qui fut unanimement dévorée, sans même chercher à en savoir plus sur les formidables pouvoirs régénérants de l’anthocyane, le responsable du bleu des myrtilles mais aussi des choux rouges (comme j’avais eu l’occasion de vous l’expliquer dans ma recette de pesto ici).

J’ai utilisé un gélifiant végétal à base d’algues, l’agar agar que l’on trouve dans tous les magasins biologiques dignes de ce nom : 2 g suffisent pour avoir une texture ferme mais sans excès. Il convient de rappeler que les algues vivant dans un milieu marin non contrôlé (qu’elles soient ramassées ou cultivées), ne peuvent décemment pas s’attribuer le label « bio » : tout au plus pouvons-nous parler d’un produit naturel.

L’agar-agar en lui-même n’est pas une algue mais un produit dérivé à base  d’algues : il est ainsi obtenu à partir de la paroi cellulaire de plusieurs algues de la famille des rodophytes (algues rouges). Découvert au Japon, quelque part au XVIIème siècle, surnommé initialement Kanten (i.e « temps froid »), ses propriétés gélifiantes auraient été remarquées par un certain Minoya Tarozaemon, hôtelier à Kyoto de son état.  Minoya ayant  jeté lestement un reste de bouillon d’algues dans la neige, il s’aperçut par le plus grand des hasards que ses déchets s’étaient transformés en longs filaments gélatineux une fois séchés au soleil. Le kanten allait dès lors entamer une brillante  carrière nippone avant de se propager en dehors de l’archipel après la seconde guerre mondiale, en étant rebaptisé au passage sous l’appellation Malaise d’agar-agar .

L’agar-agar a par ailleurs des propriétés étonnantes : outre son puissant pouvoir gélifiant, il est composé de 80% de fibres solubles qui gonflent dans l’estomac provoquant une satiété rapide(d’où sa réputation de coupe-faim) tout en facilitant le transit intestinal. Il fait également baisser l’index glycémique des glucides dits rapides en retardant leur passage dans le sang.

Cependant comme pour tout, il convient d’éviter les abus : 3g maximum d’agar-agar par personne et par jour sont recommandés suivant les directives de l’ OMS( et de manière plus précise, 50mg par kilogramme de poids corporel).

A vos verrines ! Pour un dessert léger et détonnant, parfais pour les saisons chaudes.

Pour 4 à 6 personnes :

  • 500 g de yaourt biologique
  • 2 c à s de miel liquide( c’est un dessert peu sucré mais vous pouvez en rajouter un peu plus selon goût)
  • 2 c à s d’eau de fleur d’oranger
  • 20 cl de crème fraîche liquide
  • 2 cc à café d’agar-agar
  • 150 à 200g de myrtilles (ou d’autres fruits rouges si le cœur vous en dit)

 

Pour servir :

  • Le zeste d’un citron (vert ou jaune) râpé.

 

Dans un grand bol, fouettez le yaourt avec le miel et l’eau de fleur d’oranger.

Disposez la moitié des myrtilles dans les verrines (ou petit verre ou encore des bols) et réservez le reste pour la présentation finale

Mélangez l’agar-agar avec la crème liquide puis portez à ébullition dans un petit poêlon. Baissez le feu après ébullition (thermostat 2 sur induction chez moi) et laissez cuire 2 mn, pas plus.

Hors du feu, laissez légèrement tiédir le mélange pendant quelques minutes(5mn environ) avant de le fouetter vigoureusement avec le mélange au yaourt.

Versez la préparation obtenue dans les verrines, filmez puis placez au frais pendant deux heures (il faut en général au moins 1h à l’agar-agar pour ‘prendre’).

Servez avec le reste de myrtilles et un peu de zeste de citron fraîchement râpé. Dégustez au calme en écoutant peut-être le grand Fats !

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