Un déjeuner de Yakuza!

Un déjeuner de Yakuza!
Hind
par

Lui ,c’est Yanagiba Ryuichi. Il a la quarantaine triomphante, un dragon tatoué sur le dos, une balafre sur la joue ,une barbe bien taillée et un regard de braise. Il porte des costards noirs sans cravate, des chemises blanches un peu trop grandes et une chainette peu discrète. Mr Yanagiba ne sourit jamais et parle très peu. Il prononce en tout et pour tout trois phrases dans la journée, quand il est bien luné.

Yanagiba ,ce n’est pas un type qui creuse, non, que nenni. Nada, que dalle. Pour paraphraser mon western spaghetti préféré, il serait plutôt de ceux qui tiennent le revolver, de ceux qui marmonneraient en sourdine, entre deux courses poursuites nipponnes(ou pas) :  » Dans la vie, y’a pas d’drames, y’a que des fatalités  (Audiard).

Yanagiba Ryuichi est le chef d’un gang de yakuzas, le clan éponyme Yanagiba ,pardi. Une quintessence de bad boy. Et ça se voit!

YAnagiba Ryuichi: ça ne rigole pas!

Yanagiba Ryuichi: ça ne rigole pas!

De l’autre côté nous avons affaire à Wakamizu Ryota, un jeune étudiant ni trop grand ni trop petit, plus laid que beau, doté d’une dentition légèrement proéminente et d’une estime de soi vacillante. Ryota, diplômé d’une université de troisième zone, est en plein recherche d’emploi dans la jungle du travail  japonaise ultra élitiste. Jour après jour, ses démarches infructueuses le font lentement sombrer dans une dépression de bon aloi ,doublée d’une vie amoureuse proche du néant. Ryota est en effet toujours puceau, un  » cherry boy  » comme on dit au japon !

Ryota est un peu paumé oui...

Ahum…Ryota est un peu paumé .

Rien, absolument rien ne prédestinait ces deux là à se rencontrer.

Et pourtant , « Il suffit de mettre un gigot au four pour voir venir les emmerdeurs », comme dirait le même Audiard.

Ryota se retrouve un jour coincé dans un règlement de comptes entre yakuzas avec entre autres protagonistes notre flegmatique Yanagiba. Entre deux échanges de coups de feu, Yanagiba réussit à sauver Ryota d’une balle mortelle. Et là, pour des raisons obscures, le mutique gangster décide de squatter le modeste studio de Ryota avec son homme de main préféré, en attendant que les tensions entre gangs s’apaisent. Le soir même, Ryuichi , sans demander la moindre permission, ouvre le frigo de Ryota et avec une liste d’ingrédients plus que frugale confectionne en un rien de temps un délicieux diner.

Et c’est le début de l’aventure de «  Otoko Meshi «  ,un food drama drolatique comme seule les nippons peuvent le concevoir, car la nourriture est vue sous l’angle de l’émotion dans les feuilletons asiatiques en général et pas uniquement sous celui de la technique. Notre yakuza mutique se révèle un cuisinier hors pair obsédé par l’équilibre nutritionnel et la qualité des repas ! Le tout avec des ingrédients simples et plutôt bon marché.

Quand un yakuza cuisine, c'est du sérieux.

Quand un yakuza cuisine, c’est du sérieux.

Chaque épisode dure une petite demi-heure, l’occasion pour notre énigmatique yakuza de concocter avec le plus grand sérieux des diners oishissimes (oishi = délicieux en japonais) tout en partageant trucs et astuces et en donnant quelques conseils à Ryota sur la manière d’aborder la grande et confondante aventure de l’existence. Petit à petit , Ryota va changer et prendre confiance en lui. Et en même temps la becquetance va devenir quasi sacrée dans sa vie .C’est drôle, sans prétention,ça touche à des sujets plus profonds l’air de rien, c’est peuplé d’une ribambelle de personnages secondaires attachants et surtout ça donne très faim!

Au bout de trois épisodes, je n’en pouvais plus : il fallait que je reproduise un des repas de Yanagiba Sensei même sans recette précise, en observant le visuel et en écoutant les conseils du maitre tout en me fiant à mes expériences passées de cuisine japonaise.

Je me suis donc inspirée d’un épisode de la série pour ce déjeuner yakuza très simple à réaliser et très équilibré: du poulet au miel et au gingembre, une soupe miso au radis noir et au poireau (initialement au daikon), et une petite coleslaw de chou vert à la japonaise. Le tout accompagné de riz blanc.

Itadakimasu !

Pour 2 à 3 personnes:

Poulet au miel et au gingembre :

  • 400 g de filets de cuisses de poulet (cuisses de poulets désossées et sans peau) coupés en gros dés
  • 1 c à s de miel
  • Un petit morceau de gingembre frais (environ 4 cm), pelé et râpé
  • 2 à 3 c à s de sauce soja claire ou de tamari
  • 1 c à s d’huile végétale pour la cuisson (tournesol par exemple)
  • 2 c à s de vert de poireau finement émincé

Coleslaw nippone de chou blanc :

  • 200g de chou blanc finement émincé
  • 1 oignon blanc tout aussi finement émincé
  • 3 c à s de graines de sésame grillé
  • 1 ,5 c à s de sauce soja
  • 2 c à s de vinaigre de riz ou de cidre
  • 1 cc de sucre
  • 2 c à s d’huile de sésame (première pression à froid)

Soupe miso au radis noir et aux poireaux :

  • 1 poireau émincé en biseau, blanc et vert compris
  • 2 petits radis noirs coupés en julienne
  • 2 à 3 c à s de miso blanc( en magasin bio ou asiatique)
  • 1 sachet de dachi en poudre(en vente en magasin bio ou asiatique)
  • Un carré de 5 cm d’algue kombu( facultatif mais va donner plus de profondeur à la soupe)

Riz blanc

  • 210g de riz rond japonais ou de riz à sushi.
  • 260ml d’eau

 

Haro sur le riz :

Rincez le riz plusieurs fois à l’eau froide en l’égrenant délicatement jusqu’à ce que l’eau de rinçage  soit claire. Il faut s’y prendre au minimum 3 fois mais personnellement je le fais 6 à 7 reprises avant que l’eau soit claire. Une fois l’eau de rinçage complètement claire, laissez le riz s’égoutter une petite demi-heure avant de le faire cuire. Ajoutez ensuite les 260ml d’eau.Si vous utilisez un rice cooker vous pouvez vous tourner les pouces, sinon portez riz et eau à ébullition dans un casserole à fond épais(en fonte c’est très bien), et dès que l’eau bout, baissez le feu au minimum ,couvrez et laissez cuire une dizaine de minutes. Éteignez le feu et laissez le riz couvert pendant une dizaine de minutes supplémentaires.

Banzai sur le poulet:

Mélangez la moitié du gingembre avec le poulet le miel, massez bien la bestiole à la main et laissez mariner un petit quart d’heure. Chauffez une c à s d’huile dans un wok ou une grande poêle puis faites sauter à feu vif les dés de poulet pendant quelques minutes jusqu’à ce qu’ils commencent à dorer, ajoutez la sauce soja, le reste de gingembre, baissez le feu et laissez cuire quelques minutes supplémentaires ( environ 6 à 7 minutes). Ajoutez le vert de poireau en fin de cuisson. Chapardez un morceau pour vérifier la cuisson  et éviter le syndrome de la semelle. Réservez au chaud jusqu’au moment de servir.

Coleslaw un peu nippone :

Fouettez le vinaigre avec le sucre, la sauce soja et l’huile de sésame : mélangez avec le chou, l’oignon et les graines de sésame. Servez immédiatement. Si vous préférez un chou moins croquant, laissez la salade macérer dans sa vinaigrette une petit quart d’heure avant de servir : le chou va ramollir.

Petite soupe miso express au radis noir et poireaux :

Versez le sachet de bouillon dachi dans un litre d’eau, portez à ébullition puis baissez le feu et ajoutez l’algue kombu. Laissez mijoter un petit quart d’heure avant de retirer l’algue. Ajoutez les poireaux et le radis noirs et laissez mijoter cinq minutes : les légumes doivent à peine fondre. Diluez le miso avec une louche de bouillon, versez dans la soupe, mélangez bien et servez aussitôt.

yakuza5

 

 

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Commentaires

  1. Magnifique ! Non seulement le repas semble délicieux mais en plus, le texte est un régal ! Bravo !

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