Salade de courgettes et de poivrons grillés au citron confit et aux petits légumes

Salade de courgettes et de poivrons grillés au citron confit et aux petits légumes
Hind
par

C’est un bout de terre lointaine balayé par les alizés en hiver, par les cyclones en été , une île ovoïde totalement plane peuplée de bernards l’hermite , de tortues ,d’oiseaux et  bordée de récifs coralliens.

Aucun arbre n’y pousse, aucune excroissance n’arrête le regard , aucun monticule ne vient perturber la ligne d’horizon : seules quelques broussailles et autres herbes se disputent le sol sablonneux.

L’île  Tromelin est désespérément plate.

C’est cette vision proprement accablante qui s’offre à la frégate « L’Utile » en cette nuit du 30 juillet 1761, à quelques 500 km de la Réunion. « L’Utile » est un bateau de la célèbre Compagnie Française des Indes Orientales : le navire a embarqué à Bayonne en France et se rend à l’île de France (l’île Maurice actuelle) . Auparavant « L’Utile » a fait escale à Madagascar pour s’approvisionner en vivres mais aussi en esclaves : 160 malheureux malgaches sont acheminés de force sur le bateau pour aller servir de main d’œuvre sur l’île Maurice.

Dès le début de l’expédition ,l’animosité entre le commandant et le capitaine est palpable : cette mésentente ne fait que s’accroître pendant le voyage jusqu’à pousser les deux hommes à utiliser deux cartes contradictoires de navigation. Cet orgueil risible  conduira inévitablement le navire à sa perte.

Le 31 juillet au soir  vers 22h, « L’Utile » touche un haut fond à peine couvert d’eau, un terrible fracas réveille l’équipage : le gouvernail se brise, le bateau prend l’eau et le  vaisseau  finit par s’échouer sur des récifs de corail au large de l’île Tromelin. Au milieu des grondements et de la terreur ambiante , la clameur désespérée des esclaves entravées en fond de cale déchire l’air : seules une soixantaine d’entre eux  survivra à cette tragédie.

L’équipage et les esclaves rescapés récupèrent le bois de l’épave, quelques vivre et rejoignent l’île sauvage et parfaitement déserte. Malgré le spectacle de désolation qui les accueille, ils arrivent à survivre en se nourrissant de tortues , de poissons et en buvant l’eau  à peine potable d’un puits  creusé à la va vite.

Une seule obsession les anime : quitter au plus vite cette île invivable. Très vite l’idée d’une embarcation germe dans les esprits et l’on commence à construire un radeau de fortune avec les restes déchiquetés  de « L’utile ».

Deux mois plus tard , l’embarcation est prête : Les naufragés on réussi leur pari fou ! Mais hélas pas pour tout le monde : arguant un manque de place, l’équipage français soit environ 120 marins prend le large , laissant les  esclaves malgaches livrés à leur sort sur l’île.

Le lieutenant de bord, Barthélémy Castellan du Vernet , promet de revenir les chercher mais cette promesse ne sera jamais tenue :le gouverneur de l’île Maurice s’y opposera formellement sous prétexte que » L’Utile « n’avait aucune autorisation au départ pour transporter des esclaves et que cette infraction initiale rend tout recours proprement inutile. Castellan, hanté par cet abandon tragique, essaiera à plusieurs reprises d’infléchir cette décision : rien n’y fait, les malgaches seront abandonnés définitivement d’autant plus qu’entre-temps la compagnie des indes  a fait faillite réduisant à néant toute possibilité de sauvetage.

Et c’est là que la tragédie des oubliés de Tromelin commence, un double tragédie qui plus est : à la douleur initiale de l’esclavage s’ajoute celle d’une fausse liberté sur un caillou venteux  et désert où la folie guette tout voyageur imprudent.

Il faudra attendre quinze ans, en 1776 pour qu’enfin un navire accoste sur l’île maudite : » La dauphine » , commandée par le chevalier de Tromelin y trouvera seulement huit survivants, sept femmes et un enfant, seuls rescapés des  soixante malgaches naufragés. Le chevalier donnera son nom à l’île tandis que les anciens esclaves sont déclarés libres.

J’écoutais la très jolie émission « Le temps d’un bivouac » qui retraçait cette histoire poignante et hautement romanesque tout en faisant griller des courgettes. Ce sont des choses qui arrivent.

Ile de tromelin: peu accueillante!

Je songeais à ce qu’avaient pu ressentir les oubliés de Tromelin, à cette souffrance de l’arrachement , de la perte du pays natal et de sa liberté d’homme, à ce deuxième déchirement de l’abandon dans un environnement hostile et j’en avais la gorge serrée. L’on a beau se plaire à rechercher sans cesse la beauté du monde, sa laideur vient souvent nous heurter sans crier gare.

Et tout d’un coup ces beaux légumes que je faisais griller me parurent de la plus haute importance : je rendis grâce à ce moment de simplicité heureuse ou je pouvais manger, parler, bouger sans contrainte, du moins temporairement.Cette courgette me paraissait soudain providentielle, porteuse de toute la richesse du monde : le parfum d’huile d’olive, la peau veloutée et brillante de la cucurbitacée , la rougeur capiteuse des poivrons et l’arôme  persistant des citrons confits représentaient une promesse de bonheur fugace mais certain.

Alors célébrons les moments minuscules, amis lecteurs, tant que nous le pouvons et lançons-nous dans cette belle salade estivale aux légumes grillés accompagnés d’une salsa de tomates assaisonnée au cumin et aux citrons confits.

Pour 4 personnes :

  • 3-4 petites courgettes fines
  • 3 poivrons rouges
  • 1 cc de cumin
  • Huile d’olive pour la cuisson

Salsa :

  • 4 tomates (de différentes variétés c’est encore mieux)
  • Une dizaine de radis
  • Une vingtaines d’olives noires (ridées de préférence)
  • 3 oignons nouveaux
  • 1 petit bouquet de persil plat ou de coriandre
  • 1 gousse d’ail
  • ½ concombre (de grâce ne le pelez pas, nous sommes en bio sur ce beau et les nutriments et le gout se cachent dans la peau)
  • 2  c à s de jus de citron
  • 4 c à s d’huile d’olive première pression à froid
  • Une pincée de sel (pas trop en raison des olives et du citron confit)
  • 1cc de cumin
  • 1 citron confit

Commençons par les légumes grillés : préchauffez le gril du four à 200°C. Coupez les poivrons en deux et débarrassez-vous des graines et des pédoncules. Enduisez les poivrons d’huile d’olive et faites griller pendant 15 à 20 mn jusqu’à ce que la peau commence à faire des cloques. Sortez les poivrons du four. Cachez les poivrons dans un sac de congélation : la condensation aidera à les peler. Laissez tiédir avant de peler et de couper en fines lamelles

Pour les courgettes grillées, coupez les courgettes en biais en tronçons d’environ 0,5 cm . Enduisez les d’huile d’olive. Faites chauffer un grill en fonte sur la taque de cuisson à feu moyen (thermostat 6 sur induction) et faites griller les courgettes 2 à 3 minutes de chaque côté en pressant bien. Laissez tiédir.

Assaisonnez les légumes grillés de sel et de cumin et passez à la préparation de la salsa.

Coupez les tomates, les radis et les concombres en petits dés (brunoise). Hachez l’ail avec le persil plat ou la coriandre, et émincez les oignons nouveaux. Dénoyautez les olives noires avant de les hacher grossièrement. Ôtez la chair du citron confit, récupérez la peau et hachez-le finement également.

Mélangez tous les petits légumes de la salsa avant d’assaisonner avec le citron, l’huile d’olive, le sel et le cumin

Servir dans un grand saladier avec les poivrons et courgettes grillés : dégustez avec un bon pain frais.

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