Houmous à l’ail des ours
par Hind
Dans les sous-bois au printemps, la terre est encore humide, les oiseaux s’égosillent, les arbres bruissent de feuilles nouvelles, le soleil s’ébroue, la lumière ressuscitée se faufile dans la pénombre verdoyante.
Dans les sous-bois au printemps, l’azur rit, les fleurs étincellent, la sève exulte. Il y a parfois des blessures de carmin, ou des éclats de blanc voire des exubérances safranées ou encore des frémissements de bleu. La nature se pavane.
Dans les sous-bois au printemps on s’oublie, on s’émerveille, on a envie d’embrasser toute être, toute chose. Tout semble de nouveau possible…
Dans les sous-bois au printemps on écoute ses os et on cueille de l’ail des ours.
L’éphémère et parfumé ail des ours qui réjouit le (la) légumiste comme lors de la découverte de sa première brique de lego.
Ne nous égarons point dans un Alain-Delonisme de bon aloi et scrutons cette plante printanière.
L’alium ursinum tirerait son nom de l’étrange appétence des ours bruns pour ces bulbes parfumés allant même jusqu’à creuser la terre comme des malpropres pour en déterrer.
De Mars à Mai, on repère cette délicatesse saisonnière grâce à son odeur d’ail bien évidemment : elle aime les sous-bois humides et ombragés,et se distingue par ses floraisons en forme de petites étoiles. Attention toutefois à ne pas la confondre avec la colchique ou le muguet, des plantes éminemment toxiques. La distinction se fait par le parfum : en frottant les feuilles ou les fleurs d’ail des ours ,l’odeur alliacée distinctive se répand aussitôt. Pour en savoir plus , voici quelques précautions d’usages avant d’en cueillir.
Bulbes tiges, feuilles et fleurs : tout se mange dans cette herbe généreuse, même si on utilise le plus souvent tiges et feuilles. Pour respecter la nature et comme la plante se développe par les bulbes, veillez à ne prélever que les feuilles ( les fleurs éventuellement) afin de perpétuer chaque année le spectacle des sous bois aillés.
Question cuisine, le goût d’ail y est plus subtil, plus herbacé avec des saveurs allant du délicat au piquant suivant la maturité de la plante. Les variations culinaires sont infinies : pestos, bouillons, pâtes à pain, omelettes, pasta. Bref laissez libre cours à votre imagination !
Et une fois que l’on a goûté, une fièvre étrange et saisonnière s’installe : la fièvre du chercheur d’ail des ours pardi! On commence à en voir partout, tout le temps dans une obsession gourmande de la chasse à l’éphémère. On rêve d’emprisonner l’effluve fugitive, on se retrouve à quatre pattes essayant de repérer les senteurs d’ail tandis que votre entourage vous scrute d’un œil inquiet.
Pour ma part je n’ai pas eu à m’épuiser : ce week-end mon maraîcher bio m’a offert un bouquet d’ail des ours lors de mon marché hebdomadaire. Certaines reçoivent des fleurs tandis que moi on m’offre des légumes et des herbes : du périssable au lieu des bonbons pour mon plus grand plaisir !
Mon bouquet n’avait pas de fleurs mais uniquement des tiges feuillues : j’ai utilisé tiges et feuilles car je voulais un houmous corsé, mais vous pouvez vous contenter des feuilles pour une saveur plus délicate.
Vous pouvez également légèrement poêler les feuilles si vous soupçonnez que votre endroit de cueillette est un lieu de prédilection pour les bestioles et spécialement les canidés : les crottes de chien ou de renard peuvent générer des intoxications. Une température de 60°C suffira à tuer les germes.
Je vous laisse avec ce petit haïku de printemps :
La cueillir quel dommage !
la laisser quel dommage !
Ah ! cette violette
Naojo
Pour 4 personnes
- 200 g de pois-chiches biologiques trempés la veille
- ½ cc de bicarbonate de soude (facultatif si votre blender est puissant)
- 2 c à s de tahiné bio (pâte de sésame)blanc ,ou semi-complet pour un goût plus prononcé)
- Une poignée de tiges d’ail des ours avec feuilles (environ 70g) bien lavés, crus ou légèrement poêlés dans de l’huile d’olive (cf la note canidés plus haut)
- 1 cc de cumin moulu
- Le jus d’un citron
- Sel selon goût
- 5 c à s d’huile d’olive bio première pression à froid
Finition :
- 2 cc de sumac ou de cumin ou de zaatar
- 2c àS d’olive bio première pression à froid
- une poignée de pois-chiches cuits , et légèrement rissolés dans un peu d’huile d’olive(facultatif)
Égouttez soigneusement les pois-chiches et rincez-les avant de les faire cuire dans une grande casserole avec 4 à 5 fois leur volume en eau : surveillez le volume en eau car les légumineuses sont gourmandes. Portez à ébullition puis faites cuire à feu moyen pendant 1h30 à 2h : vous pouvez ajouter du bicarbonate de soude pour attendrir les pois mais ce n’est pas nécessaire si votre Blender est puissant. Testez la cuisson : les pois-chiches doivent être fondants sous la dent.
Pendant ce temps fouettez le tahiné avec le jus de citron et hachez grossièrement l’ail des ours
Égouttez à nouveau les pois chiches . Là deux écoles s’offrent à vous:
- L’école de la patience-voire-fayotage: vous pouvez éplucher les pois-chiches en les enroulant dans un linge propre et en frottant (sans violence). La peau devrait partir toute seule à l’aide des frottements. Vous pouvez ensuite repérer les pois-chiches encore entiers pour les peler à la main. Cette méthode donne un houmous plus fin et plus crémeux.
- L’école du ce-sera-bon-quand-même: vous n’épluchez rien du tout et vous passez à l’étape suivante
Jetez tout dans votre blender fétiche : mixez par petites pulsions en ajoutant un peu d’eau froide au fur et à mesure jusqu’à obtenir une consistance crémeuse.
Ajoutez ensuite l’ail des ours, le tahiné au citron, l’huile d’olive, le cumin et une pincée de sel : mixez de nouveau soigneusement. Ajustez la teneur en sel en fin de mixage.
Servez frais saupoudré de cumin, sumac ou zaatar ,d’une lichette d’huile d’olive et éventuellement de quelques pois-chiches cuits poêlés. Dégustez avec du bon pain, des gressins ou encore des crudités en célébrant le printemps dans toute sa splendeur renouvelée.
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