Crêpes un peu coréennes au kimchi et aux oignons nouveaux
par Hind
Au pays du matin calme, on raconte que ,jadis, les soirs de pluie, les paysans avaient des vagues à l’âme. Çà surgit , ça s’ébroue ,ça vous embrume, ça vous emporte sans crier gare : C’est le spleen des champs, le bourdon des rizières, le chagrin des pâturages balayés par la drache nocturne ; ça vous prend en traître et l’on se retrouve las, tout prostré, face à l’insondable condition humaine.
La mélancolie s’empare des cœurs, tout un chacun songe à cette vie de labeur.
Il y a des soupirs et peut-être quelques larmes furtives, il y a sans doute des espoirs mêlés de regrets tandis que les averses égrainent leur musique lancinante sur les toits.
Alors ,au pays du matin calme, chez les laborieux et les gens de peu, on se soigne comme on peut : on se boit du Makgeoli, un vin de riz du pauvre , non raffiné : l’autre, le raffiné, le précieux, très semblable au saké japonais est réservé aux gosiers des riches et des puissants, les ‘yanban’ , la noblesse coréenne.
Et pour ne pas boire le ventre vide, on se bricole des petites babioles goûtues qui se préparent et se grignotent fissa, l’espace d’une éclaircie : les réconfortantes ‘pajeon’. ‘Pa’ signifie oignons nouveaux, ‘Jeon ‘ veut dire crêpe salée en coréen . Les ‘jeon’ , indispensables à la galaxie des ‘banchan’ (accompagnements) coréens sont des galettes faciles à préparer :elles se composent d’une mixture d’œuf, d’eau et de farine (riz traditionnellement, riz et blé dans les cuisines modernes) dans laquelle on jette ce qui tombe sous la main : fruits de mers, légumes, kimchi, restes de viande etc. On les cuisait traditionnellement sur le couvercle brûlant du ‘Gamasot ‘, une grande marmite en fonte servant à cuire le riz.
Au pays du matin calme, les soirs de pluie,on se serrait donc les uns contre les autres, on croquait des pajeon, on buvait du makkeoli, on parlait , on se taisait, on savourait le bruit des gouttes, on écoutait ses os : les plaisirs modestes, les joies des humbles sont souvent d’une richesse infinie .
Et le bruissement de la pluie de se mêler au grésillement si semblable des crêpes saisies à vif : communion des hommes et des éléments, à travers les âges, jusqu’à notre époque hélas délétère.
Alors certains décèleront dans cette combinaison délectable une explication pseudo-scientifique :
– quand l’humidité augment, le taux de sucre dans le sang a tendance à baisser et l’on a souvent tendance à apprécier les plats à base de farine et de féculents.
-Le Makgeolli étant faible en teneur d’alcool( 6%) mais assez riche en protéines et en vitamine b, il étanche facilement la soif
– les pajeons et le Makgeolli contiennent tous les deux de la serotonine qui stimule l’appétit : quoi de mieux pour combattre le blues des soirées pluvieuses !
Mais foin de rationalité et célébrons le printemps naissant avec ces pajeons à ma façon : j’y ai rajouté du kimchi (mon kimchi de chou rave que je prépare régulièrement) pour corser l’affaire mais vous pouvez vous en passer ou opter pour de simples crudités râpées (carottes par exemple).
Promis, vous pouvez les dévorer même en absence de toute pluie.
Pour 6-8 pajeons d’environ 15 cm de diamètre
- 100g de farine de froment blanc biologique T65
- 3 c à s de farine de riz complet biologique
- 2 c à s de fécule de maïs biologique
- ¼ cc de sel
- ½ cc de levure chimique
- 2 gousses d’ail râpées
- 2,5 cm de gingembre râpé
- 1 oeuf légèrement battu
- Un bouquet d’oignons nouveaux (5-6)
- 3 c à s de kimchi (ici de chou rave, voir ma recette)
- 3 c à s de coriandre ou de persil plat haché
- 200ml d’eau froide
- Un peu d’huile végétale pour la cuisson( huile de tournesol ici)
Sauce :
- 2 c à s de shoyu ou de tamari
- 1 c à s de miel
- 1 c à s de vinaigre de cidre
- ½ cc de flocons de piments
- 2 c à s de sésame grillé
- 1 c à s d’huile de sésame première pression à froid
- 2 c à s de ciboulette hachée
Lavez et séchez les oignons nouveaux avant de les émincer grossièrement.
Hachez le kimchi finement.
Mélangez tous les ingrédients de la sauce dans un petit bol et réservez.
Dans un grand bol mélangez tous les ingrédients secs de la pâte à crêpes : les farines, le fécule, le sel, la levure chimique, l’ail et le gingembre.
Ajoutez l’œuf et l’eau puis fouettez vivement jusqu’à ce que la pâte soit bien lisse.
Versez les oignons , le kimchi et la coriandre dans la pâte ; mélangez soigneusement.
Huilez légèrement une petite poêle en fonte avant de la chauffer à feu moyen (5-6 sur induction)
Versez une louche de pâte, faites cuire 4 à 5 mn , avant de retourner la galette à l’aide d’une spatule et de terminer la cuisson pendant 2 à 3 mn.
Servez chaud ou tiède avec la petite sauce d’accompagnement.
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